Dans la voie spirituelle que je transmets depuis des années,
la pratique ne se distingue pas de la vie quotidienne. Il s’agit de pratiquer dans toutes les circonstances concrètes de l’existence : dans le couple, en famille, au travail. Pas besoin de se retirer, de s’isoler : l’instant présent, la situation présente sont notre terrain de jeu, notre support.
Un des pièges majeurs, que l’on peut rencontrer lorsqu’on est en chemin,
est la contradiction entre les moments de grâce que nous pouvons expérimenter et la médiocrité de nos réactions au quotidien. Il peut être très douloureux de toucher des sommets, puis de retomber dans les pièges les plus grossiers de l’égocentrisme. Je vais prendre un exemple, parmi les milliers d’exemples possibles, qui nous permettra d’explorer quelques aspects essentiels de la pratique. Supposons un couple normal, dont les deux membres sont en chemin. Imaginons qu’ils fassent une retraite dans un ashram en Inde. Ils s’intériorisent, prennent du recul, s’imprègnent du climat spirituel ambiant et sentent que leur amour s’en trouve approfondi.
Petit à petit, ils vivent une forme assez profonde d’expérience spirituelle.
Imaginons maintenant qu’une fois rentrés en France, ils se retrouvent un mois plus tard dans une fête. Il voit sa compagne parler et rire avec un autre homme. Rien de bien méchant mais la jalousie, qui est une de ses réactions conditionnées, monte en lui. Il se trouve ridicule, essaie de se convaincre qu’il est au-dessus de ça, se répète qu’il doit cesser de contrôler sa compagne. Mais cela ne produit pas énormément d’effet et la colère le gagne. Sur le trajet du retour, il tente de se contenir mais la colère est la plus forte et finalement la soirée se termine par une dispute, une de plus, toujours la même.
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Elle est bien loin la belle ouverture du cœur qui les avait unis un mois plus tôt.
Le but de la voie du quotidien est de résoudre cette contradiction
en prenant appui sur l’instant présent qui est envisagé, non pas comme un obstacle mais comme un support. Au lieu de voir cette jalousie comme quelque chose qui m’éloigne de mes expériences spirituelles, de la paix intérieure, de l’amour, je la vois comme le support qui va me permettre d’y retourner.
Il n’est pas nécessaire de chercher à l’extérieur,
de retourner en Inde, de s’extraire, de recourir à des pratiques diverses. Il suffit d’être exactement là où l’on est et de s’intéresser de très près à ce qui est en train de se passer afin de faire connaissance avec cette blessure.
La connaissance de soi est donc centrale.
Mais pour que cette connaissance de soi soit possible,
l’acceptation et la bienveillance vis-à-vis de soi-même sont un préalable nécessaire. Un aspect fondamental de la pratique est donc d’observer à quel point nous pouvons nous juger, nous faire des reproches, être insatisfaits de nous-mêmes.
La connaissance est le contraire du jugement.
Ce dernier décrète en permanence ce qui est bien ou mal, admirable ou méprisable, sublime ou minable mais il ne génère pas beaucoup d’amour, d’empathie et de compréhension.
La connaissance ne juge pas, elle observe avec bienveillance.
Elle permet un retour à soi-même : « Ce que je suis, tel que je suis, ici et maintenant ».
Cette acceptation de soi inclut tous les aspects de notre humanité,
y compris les moins flatteurs, ceux que nous pourrions facilement trouver ridicules ou détestables, comme par exemple la jalousie, la mendicité affective, la lâcheté, l’arrogance, etc. Il s’agit de sortir du jugement pour aller vers la connaissance, faire preuve d’honnêteté
et d’humilité, reconnaître : « Oui, c’est ça, c’est ce que je suis, dans l’instant ».
Reprenons l’exemple de cet homme.
Retrouvons-le à cette fête, quand il sent la jalousie monter en lui. La sans se juger. Reconnaître toutes les pensées du type : « Je suis ridicule », « je suis au-dessus de ça », « comment se fait-il que j’en sois encore là alors que j’ai dix ans de thérapie derrière moi ? » et dire stop aux pensées négatives qui affluent au sujet de la situation, de la vie, de lui-même et de sa compagne.