Pepe Imaz
Tennis : la foi au service
Christian Geniller
Pepe Imaz est un ancien joueur professionnel de tennis espagnol d’une quarantaine d’années. Très jeune, son parcours a été marqué par la mort de son père alcoolique et la rencontre avec la maladie boulimique. Comme tout sportif, il ne pense qu’à gagner et il se rend compte très vite que cela ne le rend pas plus heureux. À l’âge de 25 ans environ, au plus bas physiquement et mentalement, il rencontre une femme libanaise, Siham, qui va l’aider à changer son existence. En 2012, il aide Marko Djokovic, frère du célèbre Novak, à sortir de la dépression. Depuis, à la demande des deux frères, il est présent sur les grands tournois. Le rôle de Pepe est d’être à l’écoute de Novak dans sa vie de tennisman. Novak est en recherche intérieure, il l’accompagne à vivre heureux dans la victoire comme dans la défaite. La vie va proposer à Pepe un rendez-vous important, fonder une école pour jeunes tennismans où le respect, l’acceptation, l’amour pour soi-même seront valorisés : alors que depuis déjà 15 ans Pepe partageait son expérience d’entraîneur avec des joueurs professionnels, l’académie Amor Y Paz Solidaridad (« Amour et Paix Solidarité ») a vu le jour à Marbella, près de Malaga en Espagne, en 2015, grâce à l’aide de l’hôtel-club de tennis de Puente Romano.
5 juin 2017, jour de Pentecôte. Accompagné par une amie parisienne et mon épouse, je suis près de la porte d’Auteuil où se joue en ce moment même le tournoi de tennis Roland-Garros. Novak Djokovic a joué la veille et rejouera le lendemain. Les bras grands ouverts, Pepe nous accueille dans le hall de son hôtel. C’est un partage en espagnol d’une durée de 3 heures et 30 minutes qui nous attend, dans sa petite chambre d’hôtel qu’il a fait aménager avec attention pour l’interview. Nous ressentons de la joie d’être avec lui. Pepe me l’avait dit : « C’est la vie qui organise tout ». Intimidé, je ne sais comment aborder l’interview. Il me revient mon rêve d’enfant, de jouer sur la terre ocre de Roland-Garros. Les sentiments se mélangent et je lui dis : « C’est un article de l’Équipe Magazine qui m’a permis de te connaître. J’ai vu tes vidéos sur Internet et ça m’a touché le coeur, cette façon de parler de l’amour à ces jeunes tennismans ». Pepe m’écoute avec attention. Le début de l’entretien sera ponctué d’un magnifique et long silence au milieu du vacarme parisien. D’emblée, il propose que toutes les questions lui soient posées. « Ce n’est que mon opinion, ce que je vais vous dire », dixit Pepe. Voici ses réponses.
Nous sommes tous des êtres humains un peu perdus
sur le chemin de l’amour
L’être humain est imparfait sinon il ne serait pas là, sur cette terre. Nous posons des étiquettes dans nos vies pour exister. Ce métier est mieux que celui-là, ce garçon est plus beau que celui-là. L’ego nécessite un lieu d’où je peux me situer et j’y crois, je suis ça. Oui, une partie de l’ego est indispensable pour nous protéger, notre être physique en a besoin. Mais il existe un ego malade qui nous éloigne de notre être divin. Nous sommes tous merveilleux mais nous l’avons oublié ». Pepe parle avec une voix douce et calme et même mes accompagnatrices, qui ne parlent pas l’espagnol, sont touchées par les mots. Je me dis que quand les mots sonnent, tout résonne et peu importe la langue.
J’aimerais entendre Pepe nous parler un peu plus de cet être merveilleux qu’est l’humain. Il continue : « Il y a deux émotions « mères », l’amour et la peur. Toutes nos peurs sont à l’origine de nos jugements et provoquent angoisse, nervosité, rage, colère, envie, stress, anxiété. Ce sont nos peurs qui nous font vivre dans l’ego, car dans l’amour, rien n’est effort, tout est respect, acceptation, compassion. Je crois que la grande transformation de notre être demande la transmutation de ces énergies obscures en lumière. La vie m’a mis ici à côté d’un grand joueur de tennis mais partout je peux apprendre, je suis un apprenti, un étudiant de l’amour. Dénudés de notre ego, nous sommes tous égaux, nous sommes ces êtres de vérité. C’est peut-être ce manque d’amour dans l’air de ce monde qui produit les attentats, et quelque part nous sommes collaborateurs de ces actes quand nous nous jugeons, quand nous pensons du mal de nous et des autres. Je peux comprendre ce monde et en tant qu’être humain, j’essaye chaque matin de m’apporter un peu plus d’amour et de me livrer à la journée qui commence. »
La prière, les religions, l’énergie divine d’amour
Je ressens que ses paroles s’inspirent de son vécu. Aussitôt, des commentaires envahissent mes pensées : où j’en suis moi, avec cette expérience d’amour au quotidien ? (comme une mesure sans jugement). Pepe aime se servir d’exemple pour rendre concret ses propos et par moments, il s’anime : « Quand nous avons de la fièvre et que nous sommes malades physiquement, tout le monde comprend qu’on ne peut pas aller travailler. On a besoin de soins. C’est la même chose d’un point de vue énergétique. Si un être est malade dans son ego, comment pourrait-il aimer ? La réalité est : que pouvons-nous faire nous-mêmes pour croître et apporter un peu plus de tendresse chaque jour dans ce monde ? Je sais que c’est difficile mais c’est le chemin. Quand survient un évènement négatif ou une mauvaise pensée, j’ai à transformer cela en amour. »
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Pour lire l’article en entier Reflets n°25 pages 68 à 73