Confidence d’artiste
Horéa, artiste plasticienne
Horéa nous reçoit dans son atelier-galerie, un après-midi de janvier. Il fait froid à Strasbourg, mais l’ambiance va vite se réchauffer. Horéa est une femme d’un dynamisme éclatant, pleine d’une énergie à faire monter la température de ce grand espace. Elle est tellement passionnée par son travail, par l’aide qu’elle donne à la fondation Asalya et l’association Les amis d’Emma qu’elle en oublie de parler d’elle. Ce qui lui importe, c’est la démarche de peindre et la relation à l’autre. Elle peint, colle, ponce, travaille la cire d’abeille, gratte, décolle, insère, arrache. Elle peint l’esprit du sujet, pas le sujet. Elle nous livre son parcours et ce qui la motive…
Horéa est mon prénom, et cela fait vingt-cinq ans que je vis de mon art. J’ai axé ma démarche sur un thème qui me permet de me promener entre l’abstrait et le figuratif, c’est l’héritage. Il y a eu deux étapes : les paysages et le corps. Puis, quinze ans après le début de ma carrière, j’ai profité de présenter la cathédrale de Strasbourg, un monument qui me touche et que j’ai pu observer durant toutes ces années de fond en comble, pour essayer d’en peindre l’esprit. C’est pour moi un sujet très important, car il rejoint le paysage intérieur.
Je suis plasticienne : je peins, je coupe, je déchire, je colle. Ce n’est pas seulement de la peinture, c’est multifonction. Cela rend mon travail très pictural, très riche et complexe dans sa lecture. Mon atelier à Strasbourg est divisé en deux : une partie atelier et une galerie. Je suis toujours en train de ranger, entre mon chaos d’un côté et mon joli chaos de l’autre. Cela me permet d’accueillir les gens et de leur expliquer ma démarche. Je suis une vraie sportive de la peinture et j’ai éprouvé le besoin d’enseigner. Il fallait que je fasse sortir toute cette énergie créatrice. Depuis des années, les gens me donnent ; j’ai eu besoin de rendre et de donner aussi à travers un enseignement. Ainsi ai-je été amenée à verbaliser tout ce que je faisais spontanément, et surtout d’accepter tout le monde : celui qui a envie de peindre, celui qui a peur de peindre, celui qui rêve de peindre, celui qui veut approcher ce moyen d’expression.
Une peinture traverse celui qui la lit
Dans ma démarche, j’ai choisi d’aider les associations qui font tout ce qu’elles peuvent pour améliorer le quotidien des enfants malades et de leurs parents, parce que c’est terrible des deux côtés. Depuis cinq ans, je me concentre sur l’association Les amis d’Emma. Je fais des expositions personnelles, et aussi avec mon groupe d’élèves que j’ai appelé Aeroh (reflet de mon prénom) : ce sont des artistes en herbe, que j’essaie de guérir de leurs peurs d’exposer, d’approcher le public, de recevoir la critique. Non seulement ils vont peut-être créer une émotion chez l’autre, mais en plus le profit des ventes est reversé aux Amis d’Emma. L’association et son président, Alain Léonard, ont évolué vers la fondation Asalya qui permet d’aider de gros projets. L’art est le moyen que j’ai trouvé pour les aider à trouver de l’argent, et me permettre du même coup de me tourner vers les autres.
Emma est une enfant atteinte de microcéphalie, – je ne suis pas diplômée d’art thérapie – j’ai juste un incroyable instinct, et je peux lui parler. Elle ne parle pas, elle crie juste son nom. En revanche, c’est une vraie artiste.
L’œuvre d’art, ce n’est pas un tableau que l’on accroche, c’est de la chance. C’est la partie qui consiste à peindre. Cela va sortir, c’est orgasmique, vous allez vous énerver, ou pas ; suer, ou pas. Vous allez oublier le temps, une musique va s’installer dans votre tête, avec un battement de cœur particulier. C’est cela la peinture, c’est l’acte de peindre.
Pour lire l’article en entier, Reflets n 31 pages 70 à 72