Cédric, 42 ans, et Christine, 39 ans, travaillent ensemble
dans une entreprise d’expertise comptable dont les bureaux sont situés à Paris.
Ils se retrouvent tous les jeudis soir
dans le complexe sportif environnant pour deux heures de tennis offertes à l’année à tous les salariés de l’entreprise. Ils gèrent de gros portefeuilles et depuis le début du numérique, ils tentent de maîtriser au mieux les charges croissantes de sauvegarde des données, de surveillance de virus et de ce qu’on appelle « l’hygiène numérique ». Tout doit être propre et en ordre.
Leurs cerveaux sont parfois en surcharge
mais le tennis permet d’évacuer une pression trop lourde. Se défouler est le leitmotiv du jeudi avant de rejoindre leur partenaire de vie respectif. Ce jeudi 7 décembre 2023, ils s’accordent un
grand temps d’échange en paroles avant d’échanger des balles. Ils reviennent sur cette année 2023 difficile pour
tous les deux. Cédric est apathique quand il prend la parole – Christine l’avait bien remarqué depuis quelques mois – : Tu sais Christine, je ne supporte plus les objectifs financiers que l’on nous impose, et cela depuis quelques années déjà.
Un matin, j’ai craqué.
Pourtant tout allait bien chez moi
avec ma compagne et notre petite fille. Je me suis assis sur le canapé et j’ai compris que je ne souhaitais plus travailler dans ce milieu. J’ai consulté mon médecin.
Je crois bien que c’est un burn-out.
Il m’a prescrit des antidépresseurs et depuis, je ne suis plus le même Cédric. Je suis une mécanique errante du matin au soir, je n’ai plus de rêves la nuit sinon des cauchemars où je suis toujours une pauvre victime. Je t’annonce que je n’ai plus de jus pour continuer le tennis. C’est la dernière fois.
Je dois maintenant me reposer le jeudi.
Christine, d’un mouvement peu perceptible, s’affaisse un peu plus sur la chaise molletonnée marron et verte du club-house. Ils riaient si bien le jeudi tous les deux car l’humour est leur exutoire après le travail.
Face à Cédric affalé sur son siège,
Christine se redresse avec dignité pour raconter son expérience des six derniers mois : Merci Cédric de ta confiance qui t’a poussé à me faire part de tes difficultés. Moi aussi, j’ai rencontré un médecin. Une amie me l’a conseillé pour sa douceur et sa pertinence J’ai voulu essayer.
Il m’a parlé de ce qu’il nomme « la crise de la quarantaine ».
Il semblait bien la connaître
avec ses 56 ans. Il m’a réconfortée en me précisant que d’abord c’était normal et ensuite que c’était une bonne nouvelle. Au début, je n’ai pas compris, pensant qu’il se moquait de moi. J’étais tellement mal dans ma peau et je le cachais à mon copain. Mais certains signes de fatigue et de lassitude ne sont pas passés inaperçus à ses yeux. Je ne voulais pas perdre son amour. Le docteur m’a longuement écoutée.
Puis il m’a parlé du passage de mon métier à un service à donner à la vie.
J’ai alors senti une cohérence qui m’a enthousiasmée même si, au début, je ne comprenais pas trop. Il suit un enseignement dans une association où il est question de mieux se connaître et s’aimer grâce à une pratique hebdomadaire, car « c’est la régularité qui fait le virtuose », m’a-t-il dit en souriant.
Cédric reste pantois devant tant d’enthousiasme,
lui qui se sent si vide à l’intérieur, comme ce court de tennis numéro 7 qui doit se remplir dans 30 minutes de joueurs prêts à en découdre. Il n’a envie de rien. Il avoue avoir eu une maîtresse pensant que sa vie allait s’embellir, mais les plaisirs sensuels ne lui ont apporté que de courts réconforts. Plutôt aisé financièrement avec son salaire, il n’a été comblé que pour un temps par une nouvelle voiture. Et maintenant, il songe à quitter le métier pour un autre plus attrayant selon ses mots.
Christine l’écoute attentivement sans prodiguer de conseils.
Ses lèvres brûlent d’envie de lui parler de sa vie maintenant tournée vers une recherche lumineuse ; c’est ce qui la réconforte et rend son boulot plus léger.
Elle aimerait évoquer ces matins joyeux où une pratique discrète et plus de douceur la réjouissent et apaisent son couple. Elle décide de partager son expérience : J’ai intégré un atelier hebdomadaire où les émotions et les
sentiments font danser mon cœur, Cédric.
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Il y a aussi des exercices corporels qui nous apprennent tellement sur
notre histoire passée. Jamais je n’aurais imaginé me voir d’aussi près comme dans un miroir sans fard. C’est Joseph
qui a 30 ans de plus que moi qui m’aide à me comprendre et m’aimer pas à pas et tendrement.
Que ça fait du bien de savoir que notre passé est toujours présent en nous
et que nous avons le pouvoir de réconforter l’enfant blessé en nous ! Son témoignage est contagieux et Cédric est
déconcerté devant tant de sincérité. Il ne reconnaît pas la Christine si dure avec elle-même, si carapacée dans son corps. Il la découvre joyeuse, fluide dans ses mots et dans son corps, à l’aise dans sa nouvelle tenue vestimentaire. Il bredouille : Joseph… Oui, c’est mon accompagnant.
En trouvant le tien, tu vas te redresser.
Ne me crois pas sur parole, fais-en l’expérience. Tu peux compter sur mon aide, je peux te donner des adresses si
tu le désires.
Comme en synchronicité avec les mots de Christine,
l’entraîneur, d’un signe appuyé et furtif de la main, appela les deux compères pour jouer. La balle est maintenant dans le camp de Cédric. Il s’apprête à servir. Sa balle franchit le filet, dans un sursaut qui fait penser à celui de l’espoir. De l’autre côté, Christine s’applique dans un service où, encore débutante, elle semble retrouver le goût d’un jeu sans cesse renouvelé.