L’infini passe l’homme
La présence divine dans nos vies est à la fois la chose la plus subtile mais aussi la plus concrète à saisir. Nous attendons tous et toutes un évènement grandiose voire tonitruant. L’héritage judéo-chrétien nous dit, à travers d’innombrables témoignages, que celui-ci est rarissime voire tout à fait exceptionnel. Le prophète Élie nous l’exprime dans son langage intemporel. Il arrive au sommet du Mont Carmel car Dieu lui a demandé en vision d’y venir. Il se tient à l’entrée d’une grotte attendant la manifestation divine. Il entend une tempête puis subit un tremblement de terre et pour finir voit un feu d’incendie. Mais Dieu n’était ni dans l’un ni dans l’autre. Puis il ressentit un fin silence ou une très légère brise, suivant les traductions, et la Shekina hébraïque ou la présence divine était bien là pour s’adresser à lui. Il se couvrit alors le visage car nul ne peut voir Dieu sans mourir nous enseigne la Bible car Il dépasse toute compréhension humaine.
C’est quoi la Présence de Dieu ?
L’Évangile de Jean
est d’une clarté éblouissante quand il nous dit, à la fin de son prélude, que « Nul n’à jamais vu Dieu, le Fils-Engendré qui est dans le sein du Père lui l’a fait connaître. » C’est bien en ce sens que les spirituels chrétiens évoquent une présence permanente de Dieu dans leurs vies. Quoiqu’ils ou elles fassent, tout leur être est orienté vers sa source souvent nommé le Père ou Dieu ou plus particulièrement le Christ. La Bible nous le dit dès le départ de son texte inspiré et au tout début de la création, au chapitre 4 de la Genèse, quand les hommes commencèrent à invoquer le Nom du Seigneur autrement dit sa Présence.
Cette Présence
est en quelque sorte une prière permanente au rythme du cœur et ou du souffle. Depuis les premiers Pères et Mères du désert du quatrième siècle, cette pratique s’est perpétuée massivement en Orient pour s’effacer, sans disparaître pour autant, dans l’occident chrétien. Que faisaient-ils d’autre que de vivre dans leur quotidien le verset du Psaume 27 4 « Je demande à Dieu de vouloir habiter dans sa maison ».
Présence de Dieu, Présence à Dieu
Mais pour que Dieu apporte sa présence, encore faut-il que l’être humain assure sa propre présence et d’abord à lui-même. Dans le brouhaha et le bavardage mondialisé de nos sociétés dites modernes, il est primordial d’être attentif profondément à soi-même et aux autres. Cela revient aussi à remettre au cœur de nos journées l’écoute au sens biblique du « Écoute Israël ». Pour entendre le message, quelque soit son origine, il faut d’abord ouvrir ses propres oreilles en se décentrant de notre nombrilisme ambiant. Et alors la mystérieuse rencontre peut s’établir identique à celle du papillon voletant autour de la lumière d’une chandelle allumée.
L’âme papillon et la Présence
L’héritage chrétien
nous a légué, entre bien d’autres, le symbole du papillon tacheté de couleurs multiples qui sont autant d’archétypes porteurs de sens. La peinture qui orne ce texte, œuvre d’Isabelle Fomerand, en symbolise le sens. Nous y trouvons, ou retrouvons, dans ces jeux de couleurs, l’attirance quasi magnétique de l’âme pour sa source. Nous découvrons ainsi nôtre capacité à mourir pour renaître comme la chenille ou la chrysalide qui est la matrice du papillon.
La présence à Dieu
et donc à soi est l’une des voies spirituelles qui nous est transmise par le christianisme. Notre mosaïque intérieure, mobile et changeante, met en place une petite méthode sans méthode comme le rappelait dans ses écrits Jeanne Guyon (1646-1717) que l’on redécouvre de nos jours. Comment ne pas se perdre dans les méandres de nos vies ? Comment cheminer et aller vers notre propre inconnu ?
La peur et l’occultation de la mort
si caractéristique de notre époque où l’idéal est une sorte d’éternelle jeunesse, évidemment inatteignable, a sa réponse : s’éveiller à la Présence qui nous habite le plus souvent inconsciemment.
Il est la plupart du temps oublié
que le nom de chrétien ne fut donné à Antioche que vers l’an 60. Auparavant, ceux qui suivaient les enseignements de Jésus étaient appelés disciples de la lumière ou encore adeptes de la Voie. Cette chronique fait partie de l’actuel dévoilement ou redécouverte de la sève première de la Parole. Comme le papillon, il nous reste à apprendre au quotidien à mourir à nos certitudes pour aller toujours plus loin vers l’horizon de nos incertitudes. Nous accèderons alors à une renaissance finale qui n’aura pas de fin après avoir gravi les rochers de la montagne du dedans.
Les prochaines chroniques donneront quelques indices ou témoignages que l’occident mystique a expérimentés tout au long de son histoire : silence, discernement, écoute….la liste en est fort longue !
Gérard Emmanuel Fomerand
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Cet article a 4 commentaires
J’aime la plume de Gérard Emmanuel qui par ses écrits touche les âmes. Merci
Merci Chantal…la revue Reflets est sur une ligne éditoriale que je partage totalement ….donner du sens aux mutations qui traversent nos sociétés contemporaines et donner un ou des sens à notre monde en transition.
J ai fortement apprécié ces écrits qui se rapprochent de mon ressenti. Merci et au plaisir de vous lire. Anne-Marie
Merci Anne Marie de vos commentaires…un long chemin , personnel et collectif, de redécouverte de nos sources et mémoires enfouis par la sécularisation commence .Comme le disait le père Alexandrie Men, prêtre orthodoxe russe, le christianisme ne fait que commencer. et nous faisons un pas, un tout petit pas , vers l’infini qui nous habite.