Pasteur retraité de l’Église protestante unie de France, Daniel Bourguet a exercé divers ministères en paroisse et dans l’enseignement théologique. Il a animé comme prieur pendant une vingtaine d’années la communauté de la Fraternité spirituelle des veilleurs. Depuis autant d’années, il s’est retiré dans un mas cévenol aménagé en cloître, la fraternité des Abeillères, pour vivre sa vocation de moine et de pasteur.
Nous avons rencontré un homme amoureux du silence menant une vie d’ermite. Ses journées sont consacrées à la prière, à l’écriture (il est l’auteur d’une vingtaine de livres) et aussi à l’accueil de personnes qui souhaitent un accompagnement spirituel.
Qu’est-ce que la paix pour vous ?
C’est une juste relation avec les autres, avec Dieu et avec soi-même. Je la situe essentiellement au niveau de la relation. C’est tout un processus qui n’est peut-être jamais fini parce qu’il y a toujours des petits accrocs, des retours en arrière, des remises en cause. C’est aussi une invitation à y participer. Nous ne sommes pas simplement récepteurs de cette paix – même si le Christ est essentiellement le donateur de paix – mais il nous invite aussi à être artisans de paix nous-mêmes. Nous avons donc à recevoir et à construire, de la meilleure manière, cette paix avec les autres, avec Dieu, avec soi-même.
Est-ce d’abord une question individuelle ?
Je dirais oui parce que c’est ce qui m’habite en premier. Bien sûr, la paix au niveau mondial, entre les églises, entre les peuples, c’est aussi une immense question mais qui me dépasse, alors que la paix au niveau individuel m’est un peu plus accessible. Je sais qu’il peut y avoir des répercussions sur ce que je vis moi-même en tant qu’artisan de paix ou récepteur de paix. Cela peut s’épanouir, se transmettre et rayonner autour. Et de ce fait, je peux participer. En revanche, même si je suis assoiffé de paix entre les peuples et entre les églises, qu’est-ce que je peux faire sinon prier et œuvrer personnellement, jour après jour, au niveau qui est le mien, et dans les occasions qui se présentent sans chercher à avoir de grands objectifs ? La paix au quotidien peut effectivement rayonner à partir de moi.
Artisan de paix, quel beau terme ! De quelle manière pouvez-vous l’être ?
Ce terme est une traduction d’une des Béatitudes prononcée par Jésus. Je peux l’être par ma manière d’être dans ma relation avec les autres. Je peux l’être dans ma parole, mes gestes, mes attitudes. Et forcément, si je ne suis pas en paix avec moi-même, c’est très difficile d’être artisan auprès des autres. Mais déjà cette relation intérieure qui vient du Christ et qui est à œuvrer avec lui m’apparaît essentielle. Je suis moine et donc du coup, c’est l’immédiat qui me mobilise le plus, même si la perspective est universelle, mondiale, voire entre le ciel et la terre.
Est-ce une question importante pour vous au quotidien ?
Je ne sais pas si j’y pense tous les jours, mais dès qu’une occasion se présente de la répandre, alors, j’essaie de ne pas passer à côté. Et cela peut se produire au quotidien. Mais je ne me lève pas le matin en me demandant ce que je vais faire pour la paix. Je suis aux aguets, vigilant, attentif à tout ce qui se passe et là, je peux essayer de voir comment je peux contribuer, ajouter de la paix plutôt que de l’endommager.
Vous réveillez-vous en paix le matin ?
Grâce à Dieu, oui. Il m’a donné beaucoup de paix, et je lui en suis très reconnaissant. J’essaie de la rayonner le mieux possible sans excès – je ne veux pas me mettre en avant. Mais elle peut rayonner toute seule. Les hommes paisibles sont facilement reconnaissables. Quelque chose émane de ces êtres qui sont en paix. Pour moi, ça ne peut venir que de Dieu, c’est évident. Essayer de bâtir la paix sans tenir compte de Dieu, c’est un échec, c’est vain. En revanche, accueillir cette paix et la rayonner me paraît important. Alors la paix au niveau des relations va de pair avec le pardon. Je ne peux pas être artisan de paix si je ne sais pas pardonner. Le pardon est fondamental et source de paix.
Pour lire l’article en entier, REFLETS n°34 pages 42 à 43