Faouzi Skaliest est docteur en anthropologie, ethnologie et sciences de religions.
Écrivain francophone, il se situe entre l’Orient et l’Occident et oeuvre pour le dialogue des hommes et des cultures.
Que sont la pratique spirituelle et la pratique religieuse pour vous ? Y voyez-vous des différences ?
J’appartiens par mes origines à une famille soufie qui avait une pratique religieuse. Dans ma jeunesse, cela faisait simplement partie d’un paysage culturel sans plus d’importance.
Jeune étudiant à Paris, éloigné de ma culture,
je pouvais passer des jours et des jours sans regarder le ciel comme la plupart des gens qui m’entouraient. Les questions politiques
et sociales prenaient beaucoup de place dans le milieu universitaire d’alors.
Au bout de quelque temps,
je me suis rendu compte que j’éprouvais un manque que je ne pouvais pas nommer. J’avais l’impression qu’il y avait un manque, un
trou dans le monde tel que je le connaissais. Des questions existentielles ont commencé à s’imposer à moi de façon de plus en plus prégnante. Je ne voulais pas que cela soit une simple recherche d’appartenance identitaire.
Je ne souhaitais pas revenir à l’islam seulement parce que cela faisait partie de ma culture.
C’était même pour moi un facteur de résistance. J’ai commencé à chercher le plus largement possible des textes de diverses philosophies spirituelles. C’est ainsi que j’ai découvert les grands textes du soufisme. Le livre du dedans de Rûmi qui venait d’être traduit par Eva de Vitray- Meyerovitch a attiré mon attention.
En le lisant, j’ai trouvé réponse à des intuitions et des questions
qui m’habitaient et que je croyais sans sens. D’un seul coup, je commençais à comprendre qu’il y avait une histoire, un parcours intérieur de l’âme. Je découvrais un véritable continent intérieur pourtant méconnu ou ignoré.
Ce qui m’a frappé c’était la convergence de tous les grands courants spirituels
vers quelque chose de commun : la nécessité d’une connaissance de soi qui mène nécessairement à une connaissance spirituelle.
La religion s’est ensuite imposée comme un deuxième terme. Elle devenait un moyen et non pas un but, un chemin et non pas une
appartenance identitaire. La mise en pratique et les rituels proposés par la religion n’ont pas de sens sans la spiritualité, de la même manière que la spiritualité a besoin de s’incarner par la pratique quotidienne.
On peut avoir une spiritualité en soi
mais elle doit être mise en œuvre par la pratique. Les rites, le jeûne, les méditations, les veillées de Dhikr (invocations) et de Samaa (chants spirituels), les grands poèmes et textes soufis comme La Conférence des oiseaux d’Attar sont des récits symboliques qui décrivent ce voyage de l’âme vers son accomplissement spirituel.
Quelle est votre pratique au quotidien ?
Le lien entre le moyen et la finalité,
entre pratique spirituelle et religieuse, s’est fait pour moi par la recherche d’un Compagnon, d’un maître, qui ayant effectué ce voyage pour lui-même sera à même de m’aider à franchir ce parcours, à en cerner les difficultés et les épreuves.
Le Compagnon sert de miroir
dans ce processus de transformation intérieure. C’est ainsi que j’ai rencontré Sidi Hamza qui est devenu pendant des décennies mon guide spirituel. Il m’a transmis des pratiques quotidiennes basées sur le « Dhikr », qui s’apparente à l’hésychasme dans la tradition
orthodoxe, que l’on accomplit en se servant d’un chapelet. C’est un outil indispensable d’un disciple de la voie.
La répétition de certains noms divins ou prières
ont pour premier effet d’arrêter le flot de pensées discursives et associatives et de se disposer à entrer dans d’autres niveaux de perceptions ou de conscience. Ce processus d’approfondissement est le propre d’un état de contemplation qui passe par plusieurs étapes.
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