Confidence d’artiste
Davina DELOR :
la vie est comme le trajet d’un funambule
Christian Geniller
Nous nous sommes rendus à la rencontre de Davina Delor dans sa ferme du Poitou à Haims près de Montmorillon qu’elle a transformée depuis dix ans en monastère bouddhiste, Chökhor Ling, au service de l’humain. Désormais du nom de Davina Gelek Drölkar depuis ses ordinations en 2007 et 2012 dans l’ordre des Gelugpa au Tibet, elle poursuit son chemin spirituel tout en donnant des cours de yoga « corps-esprit ». Un monde où elle a baigné dès l’enfance avec sa mère, son premier modèle de vie spirituelle. Animatrice de la célèbre émission Gym Tonic en compagnie de Véronique de Villèle de 1980 à 1987, épisode heureux de sa vie sans qu’elle soit pour autant tombée en pamoison devant l’univers « des paillettes », elle accomplira une vie professionnelle très riche d’expériences.
Qu’est-ce que la foi pour vous ?
Je crois en un ensemble, support de tout ce qui est extrait de cet ensemble, pur et parfait. C’est une école, un apprentissage, des choses qui dépassent aussi mon entendement. Je me relie sans cesse à ce tout et je sais qu’il y a des moyens d’agir sur nos faiblesses, défauts et incapacités. J’ai appris à les regarder, les rencontrer, les accepter et les aimer.
J’ai toujours trouvé le sens de ma vie dans le spirituel
Et aussi oser les montrer, ne pas se cacher derrière une façade même si je sais que sans l’attention à moi-même, je peux réagir dans la colère. Se montrer tel que l’on est donne une force d’acceptation dans le partage humain. Mes faiblesses à découvert se dissolvent sinon elles restent en moi. La seule chose sur laquelle l’humanité peut se fier, c’est cette confiance en l’absolu qui est beau et pur. La foi, oui, mais encore faut-il percevoir quelque chose qui nous rattache à elle ! Les maîtres qui ont jalonné ma vie sont dans différents courants fondateurs : le bouddhisme et la chrétienté. Je ne me suis jamais demandé quel était le sens de ma vie, je l’ai toujours trouvé dans le spirituel.
Dès l’enfance ?
Oui. Et dans l’émerveillement. Je partageais avec ma mère le yoga, la prière, tout en les vivant comme une enfant. J’ai eu une foi qui, très rapidement, m’a emmenée vers la vie spirituelle et a aidé l’adolescente que j’étais à accepter le suicide de mon père et, plus tard, le décès de mon fils. Je n’ai été touchée que temporairement. J’ai connu la pauvreté avec ma mère mais je n’ai pas baissé les bras. La vie spirituelle m’a donné un ancrage, une relation à autre chose qu’aux apparences et aux faits qui reviennent dans une vie.
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Donc selon vous, le monde actuel a besoin du spirituel ?
Oui, mais pour moi c’est une spiritualité non religieuse qui est nécessaire. Les religions doivent comprendre qu’il n’y a pas qu’un système religieux, c’est grotesque. Il y a une matrice spirituelle où tous les chemins mènent. Dans cent ans, tout sera ouvert.
La mission de l’homme est de s’accomplir
Je crois que l’incarnation, avec cette croyance des vies successives, est une évidence, sinon quel sens aurait la vie ? Toutes les expériences vécues qui se présentent laissent le choix à l’homme, ce que n’ont pas les autres espèces. C’est une grâce. Cela détermine notre liberté d’exercer notre capacité à évoluer. Peu importe que nous nous trompions, nous recommencerons. Je me réfère souvent à saint François d’Assise qui parle de souffrance, moi je dis qu’il faut aussi trouver cette joie en nous. La mission de l’homme est de s’accomplir et d’être heureux, c’est un moyen.
Comment trouver cette plénitude ?
Le chemin spirituel est une voie merveilleuse. Le plus important n’est pas la souffrance, c’est être dans un état de reconnaissance qui crée le bonheur en soi. Ma devise est : « Dans le monde, en dehors du monde ». En dehors du monde pour ce que j’ai choisi d’être, c’est-à- dire me relier, prier. Même si nous avons nos vœux de renoncement, la vie que je mène n’est pas pour moi une vie de renoncement ! Sans mot le matin au lever, il me vient un grand merci, une gratitude d’être là.
L’essentiel est que les gens trouvent leur réponse par eux-mêmes
Et je crois en la force de rencontre avec l’autre, le partage humain reposant sur les bases de l’amour humain. Réunis, si ça vient du coeur, c’est une union sacrée que toute la terre et la nature ressentent. Et comme un effet papillon, ce partage résonne dans l’univers, amenant une infime parcelle bénéfique dans le monde. Alors que les petites colères nourrissent leurs racines et la mémoire de guerre qui s’accumule. Autant ressasser de l’émerveillement ! La méditation et la prière permettent cet état d’être constant qui n’est pas dans l’obsession des formules, un état de relais avec l’autre, plus grand que soi. Un état de relais supérieur, une conscience à soi-même et à l’autre, l’espace sacré que nous portons tous en nous mais que nous ne reconnaissons pas.
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Pour lire l’article en entier, Reflets n° 30 pages 74 à 79