D’entrée de jeu, le simple mot « secte » fait son effet funeste et angoissant et entraîne les médias hexagonaux dans une étrange hystérie de délation. Dès qu’on s’éloigne des traditions des grandes religions établies (le judéo-christianisme dans son ensemble), on est vite taxé de danger public, d’escroc, de hors-la-loi, de barbare de la pensée. Pour peu qu’on se rattache plus ou moins à un syncrétisme audacieux, ou à quelques écoles psychanalytiques mal définies, on est voué au pilori, excommunié même de la société civile, quand on n’est pas martyrisé, ni plus ni moins !
Poète, psychanalyste d’inspiration jungienne, ancien directeur de l’ex- Centre DIDRO (Centre de prévention et de soins pour toxicomanes, reconnu d’Utilité Publique), essayiste, Jean-Luc Maxence est surtout le maître d’oeuvre de La francmaçonnerie, Histoire et Dictionnaire, Collection Bouquins, Robert Laffont, 2013. Spécialiste des religions, son dernier ouvrage Psychanalyse et imaginaire des légendes maçonniques, d’Hiram à Dark Vador, écrit avec le sociologue Frédéric Vincent (Dervy, 2015) est paru en septembre2015.
Les Scientologues sont avant tout des escrocs, c’est bien connu (quelques scandales financiers probablement fondés n’empêchent pas l’église créée par L. Ron Hubbard de venir efficacement en aide aux autres, de lutter sans relâche contre les toxicomanies, de faire progresser la cause universelle des Droits de l’Homme, de combattre certains abus psychiatriques, de prôner le respect de soi, d’avoir même des « ministres volontaires » apportant une aide véritable en cas de catastrophes naturelles ou technologiques… ). Comme les fidèles du Guru Maharadji, les Scientologues font peur en France, et ce d’autant qu’ils croient aux vies antérieures et à la migration des âmes, et qu’ils encouragent de nouveaux états de conscience ! De même, les Témoins de Jéhovah (plus de 120 000 membres en France) sont persécutés pour leur refus des transfusions sanguines ou leur frayeur apocalyptique, les sobres mormons font fantasmer sur l’Amérique à convertir, l’Église « mooniste » sur les vertus du mariage à la chaîne, la Conscience de Krishna sur la chasteté, et tout ce qui appartient à l’expérience personnelle et à la mouvance du New Age – qui a déjà pris de l’âge ! – semble bien souvent, selon les chasseurs de sectes, confondre les aspirations religieuses légitimes d’un individu pensant et les fins lucratives de l’habile commerçant.
En Occident, tout serait lobbying masqué. Autour des sectes rôdent toujours des odeurs de soufre, des controverses tordues, des angoisses issues des intégristes de tous poils, et une peur bleue et permanente des « manipulations mentales » !
Comme l’explique très bien la professeure Anne Morelli de l’Institut d’histoire des religions de l’université Libre de Bruxelles, le temps du Grand Complot des juifs, des francs-maçons, des jésuites et des communistes militants est presque oublié. Il est devenu dépassé et démodé ; il a été remplacé par la sombre menace universelle suspendue au-dessus des têtes les plus innocentes qui a pour nom à jamais maudit : SECTE. Il faut désormais compter avec « la secte des adversaires des sectes », et supporter le raz-de-marée des dénonciations les plus grossières, en sachant, bien entendu, que tout ce qui est inédit au plan religieux correspond à chaque fois avec le satanique lavage de cerveau ! De ce point de vue, la trop célèbre Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) a viré au fiasco, même si elle a jugé bon d’ajouter en catastrophe et très tardivement, après les attentats de Paris de janvier 2015, un secteur hypothétiquement ad hoc de lutte contre les aberrations sectaires issues de l’Islam et débouchant sur Daech…
L’hystérie purificatrice continue : chaque année, encore aujourd’hui, la Miviludes reçoit plus de 2000 « signalements » et « forme » environ 1500 « agents publics » chargés d’éviter les comportements de radicalisation et de lutter, bien entendu, contre les replis sectaires.
Lire la totalité de l’article…REFLETS n°17 pages 52 et 53