Lama Lhündroup (Frédéric La Combe) est enseignant de la Buddha University fondée par Denys Rinpoché avec un campus online et un campus résidentiel situé au Domaine d’Avallon à Arvillard (73). Après une maîtrise de chinois et des activités de traducteur, il a fait une retraite de trois ans dans la tradition tibétaine. Depuis une vingtaine d’années, il travaille au service du dharma et des programmes de la Communauté Rimay.
Qu’est-ce que la foi ?
La fin des grandes idéologies religieuses et politiques qui a marqué le XX e siècle, a-t-elle emporté avec elle un archétype de l’expérience humaine, la « foi » ? Pour partie oui et il faut s’en réjouir. Que cela soit au nom de l’amour divin ou du messianisme révolutionnaire, la foi fondée sur une croyance aveugle dans un dogme religieux ou politique est la cause des pires aberrations et crimes de l’histoire. Donc, la foi en un énoncé conceptuel érigé en vérité absolue est une idolâtrie mortifère.
Cette prise de conscience des illusions idéologiques nous aurait-elle libérés des scories perverses de la foi qui pourtant, dans son essence positive, est la source des idéaux, des œuvres et des actions humaines les plus admirables ? Peut-être, mais seulement, si nous savons en tirer les enseignements.
Afin d’y voir plus clair, abandonnons le concept de « foi » trop chargé par l’histoire et employons plutôt le beau nom de « confiance », en nous référant à l’expérience qu’il évoque. L’expérience dont il s’agit constitue un arrière-plan cognitif et sensitif qui conditionne favorablement notre relation à nous-mêmes, aux autres et à notre environnement.
Ce sentiment est subtil et profond. Il semble avoir une dimension naturelle innée qui vient de notre capacité enfantine à faire confiance, tout simplement. Ce « bon vouloir » spontané et généreux, est l’espace fécond où croissent les vertus et finalement les valeurs humaines universelles. Mais c’est aussi le lieu des illusions, des tromperies, des impostures et des manipulations les plus dévastatrices. C’est pourquoi la confiance doit être associée à la lucidité du discernement.
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Peut-on augmenter sa foi ? Comment ?
Dans l’esprit de ce que nous avons dit précédemment, il serait préférable de diminuer sa foi et d’augmenter sa confiance !
La confiance est comme une graine ou un terrain que nous pouvons cultiver et faire grandir. Au niveau spirituel, l’enseignement du Bouddha, par exemple, est fondé sur deux moyens de connaissance valides dont l’affinage est source de confiance : la raison logique et l’expérience directe.
La raison nous permet de poser les bonnes questions et l’expérience directe se découvre dans la pratique de la méditation de pleine présence. Cette pratique contemplative millénaire n’est pas un exercice intellectuel, ni une élaboration mentale. Elle ne suppose pas d’avoir la foi. Elle demande une simple confiance à faire face à nous-mêmes. Ces qualités sont à même de renouveler notre conscience et notre relation au monde.
Est-ce qu’en ce moment la foi se développe dans le monde ?
La confiance est le remède à la peur qui empoisonne le monde humain. Aujourd’hui, la peur est amplifiée par l’anxiété et par les crises multiples, dont la crise sanitaire actuelle, qui menacent les conditions écologiques de la vie humaine. Les conséquences économiques et sociales de cette multi-crise ébranlent notre mode de vie. Alors, vers où tourner son regard pour faire face à de tels défis ?
Peut-on y faire quelque chose ?
Quelles sources, quels horizons pourraient susciter la confiance dont nous avons besoin ?
C’est une question essentielle car la nature de la confiance dont nous parlons est le foyer d’une énergie réparatrice et créative. Elle est dotée de multiples vertus capables de soulever des montagnes.
À l’heure des enjeux ultimes de notre temps, il semble que nous pouvons faire au moins deux choses : redécouvrir d’une part la source primordiale de la confiance dans notre cœur et notre esprit et d’autre part développer la confiance dans l’action. Les deux supposent de remettre en question radicalement notre mode de vie fondé sur l’avidité consumériste.
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Pour lire l’article en entier REFLETS n° 38 pages 58 à 61