J’ai reçu le Sadao de Birmanie, c’est le Dalaï-Lama de la Birmanie.
Sur conseil du Dalaï-Lama, il est venu visiter la Suisse. Il savait qu’on était assez en avance sur ces questions et il a passé une journée entière avec moi à l’hôpital universitaire. Je lui ai montré tout, la pharmacologie, l’imagerie cérébrale, les psychothérapies, les divisions d’accompagnement des patients, les psychothérapies institutionnelles et aussi la méditation que nous pratiquons à l’hôpital, mindfulness, une méditation laïque, qui est prise en charge par le système de santé. Il a trouvé ça très intéressant. Le soir, nous nous sommes arrêtés un moment et je lui ai demandé ce qu’il pensait de tout ça. Il m’a dit que c’était très bien, très beau.
Mais, il m’a dit : “Est-ce que je peux vous parler sincèrement ?”
Je lui dis : “Oui, j’espère bien”.
Il m’a dit : « Vous êtes un homme sage mais j’aimerais pouvoir vous dire quelque chose”.
Je lui dis : “Je vous en prie”.
“Il semble que vous mettez la majorité de vos budgets dans l’étude du cerveau, le traitement des maladies neurobiologiques, les neuroleptiques, la psychopharmacologie. Nous n’avons pas ça en Birmanie. Et puis, il semble que vous écoutez les gens, que vous parlez avec eux, c’est ce que j’ai compris de la psychothérapie que vous pratiquez et c’est vraiment très bien. Mais, vous mettez 80 % de votre budget dans les scanners et les médicaments. Vous mettez 18 % dans la psychothérapie. Mais il semble que vous avez une toute petite activité de méditation dans votre hôpital. À mon intuition, je pense qu’il faut faire le contraire. Je pense qu’il faut mettre 80 % de l’énergie dans l’éducation de la population à la méditation. Il faut mettre peut-être 18 % pour parler avec les gens, c’est important aussi, et peut-être 2 % pour les médicaments. »
Il a inversé la pyramide et c’était d’une immense sagesse.
Nous sommes très loin de ça en occident. Ça m’a impacté, j’ai trouvé ça très intéressant.
Jacques Besson
Article inédit annoncé dans Reflets n° 54 page 43