Je suis émerveillé par Rosetta. Non, ce n’est pas une top-modèle. C’est une sonde spatiale lancée par l’ESA (Agence Spatiale Européenne) en 2004. Elle a parcouru 6,4 milliards de km pleins de péripéties dont trois ans de mise en sommeil. Au mois d’août, elle vient de se placer en orbite à 100 km autour d’une comète nommée Tchourioumov-Guérassimenko - Tchouri, c’est plus simple - tournant autour du soleil. Le 11 novembre, elle enverra un petit module qui se posera à la surface. Tout ceci pour comprendre la formation du système solaire.

L’intelligence humaine, décuplée par celle des ordinateurs est capable d’exploits éblouissants. Cette conquête de l’espace n’est pas sans rappeler la conquête du nouveau monde au XVIe siècle. Il fit rêver, comme aujourd’hui. Mais deux attitudes opposées existèrent aussitôt : - une conquête pour trouver de l’or, des richesses à exploiter sans vergogne.- une recherche de terre vierge pour créer de nouvelles modalités de vivre plus pures dont le Mayflower est emblématique. Avant d’accoster, les passagers, les « Pilgrim Fathers », signèrent un pacte (connu sous le nom de Mayflower Compact) régissant les principes de la future colonie. Ils sont souvent considérés comme les pères fondateurs des futurs États-Unis d’Amérique.

Cinq siècles plus tard, la conquête spatiale risque de reproduire les mêmes schémas. D’un côté, chercher à enrichir et asseoir le pouvoir des nations capables de mener cette aventure. Et de l’autre, pourquoi pas, créer des colonies avec des nouvelles modalités de vivre ensemble tant la terre sera devenue délétère. Il est probable que le résultat sera un composé des deux.

Dans le nouveau monde, les principes de la démocratie ont inspiré une constitution exemplaire aux États-Unis, rompant avec l’arbitraire royal, instaurant un contrôle des citoyens sur la vie publique. Et l’ancien monde a continué de se déchirer pour accaparer les richesses, tout en jetant les bases de la modernité.

Finalement en cinq siècles, les ressorts humains ont peu changé. La plupart des hommes continuent de croire qu’en changeant l’extérieur l’humanité peut changer. Tous les « ismes » montrent cette illusion : communisme, capitalisme, intégrisme, scientisme, etc. Il est encore si difficile de percevoir que tout part de dedans. Le dehors n’est que le reflet. C’est le rôle de REFLETS de soutenir que la lumière provient du dedans. Même le soleil, bientôt sous le regard de Rosetta, aussi admirable soit-il, n’est qu’un reflet.

Christian Rœsch