Osons la fraternité !
Alain Michel
Alain Michel, né en 1944 à Lyon, est un éditeur et humanitaire français, engagé dans la propagation de la paix dans le monde. Il a organisé les convois pour la paix à Sarajevo, à Bagdad, au Kurdistan, à Gaza, mais également les Congrès mondiaux des imams et rabbins pour la paix à Bruxelles, Séville, Paris<. Fondateur des associations Artisans de Paix, ÉquiLibre et de la fondation Hommes de Parole, Alain Michel est aussi à l’origine du mouvement 24 Heures de méditation pour la Terre qui a eu lieu le 1er novembre 2015.
Après trente-cinq années d’actions concrètes pour la paix dans ce monde qui semble chaque jour de plus en plus tourmenté, n’avez-vous pas perdu l’espoir de la paix ?
Je ne pense pas que notre monde soit plus tourmenté aujourd’hui qu’il y a quelques décennies. Il n’y a pas si longtemps, le monde vivait deux grandes et terribles guerres mondiales, suivies par celles de Corée, du Vietnam, d’Algérie, du Rwanda, de Bosnie, etc. Hormis les conséquences de l’accélération du réchauffement de la planète qui semblent irréversibles et qui sont devenues une priorité, le monde irait plutôt mieux. Et puis, il y a du nouveau qui nous met en action : la conscience de l’homme, individuelle et collective, qui se développe à grande vitesse, et particulièrement chez les jeunes.
Alors, la paix, c’est pour demain ?
J’ai perdu l’espoir de la paix pour demain, mais pas l’espérance, bien au contraire ! Nous savons plus que jamais que les solutions ne viendront pas des institutions politiques ni religieuses. Tout au long de ma vie, j’ai rencontré des personnes extraordinaires de joie, de courage, d’abnégation. Elles sont des millions sur la planète. Je crois en l’Homme, et en sa capacité infinie de bien, de beau, de bon. La paix ne dépend pas des autres ni d’experts ou de spécialistes. Elle dépend d’abord de moi. La paix du monde, c’est l’affaire de chacun d’entre nous individuellement. La priorité est d’acquérir la paix intérieure. C’est à ce prix seulement que le monde changera. Agir pour la paix lorsque l’on est soi-même dans un conflit intérieur est non seulement inutile mais totalement contre-productif. De plus, il est dramatique d’alimenter le mal en se complaisant à le regarder, le critiquer, le communiquer. Il est au contraire important et vital de voir le beau, le positif autour de soi. C’est le seul moyen de nourrir et de faire grandir le bien : « Mieux vaut allumer une bougie que maudire les ténèbres… » .
Comment mettre cela en pratique ?
Après de nombreuses années dans l’humanitaire, j’ai pris conscience qu’il n’existe qu’une seule cause aux désordres de l’humanité, quels qu’ils soient : famines, guerres, cracks boursiers, mouvements sociaux, réchauffement de la planète…, c’est l’intérêt individuel – ou de groupes – au service de puissances financières qui se développent au détriment de la fraternité. Si je peux soulager une souffrance, et que je ne le fais pas, je deviens complice et co-responsable de la cause de cette souffrance. C’est cette prise de conscience personnelle qui m’a mis sur le chemin de l’humanitaire, car cette transformation intérieure mène tout droit à la fraternité : parodiant André Malraux, j’affirme que le XXIe siècle sera fraternel ou ne sera pas. La cause de notre souffrance est notre incapacité à pratiquer la solidarité au quotidien, en ne réalisant pas que l’autre est un autre moi-même. Prendre conscience que toute personne est sacrée conduit à la fraternité. Il s’agit juste d’ouvrir son cœur et de prendre conscience que, dans toute situation de souffrance, l’autre existe : « Aime ton prochain comme toi-même ». Si l’on médite un peu sur cette phrase, on en découvre tout le côté révolutionnaire. La vraie fraternité, c’est l’amour. Il ne peut s’éteindre, il est ; il ne brille pas, il brûle ; il ne s’achète pas, il se reçoit. Si on le cherche avec le cœur, on le trouve toujours.
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Pour lire l’article en entier, REFLETS n°34 pages 61 à 63