La correspondance,
la réhabilitation de cœur
Parfois, ces murs sont difficiles à repousser et quand ils commencent à se refermer sur nous, une lettre ou une simple carte qui dit : « Je pense à toi » constitue une bouée qui en a sauvé plus d’un (Extrait d’une lettre de Roger du 17/09/2005, tiré du livre L’Audace d’aimer, éd. Jouvence).
Les correspondances ont eu une place centrale dans la vie de Roger. Il a reçu ses premières lettres grâce à l’association Lifespark , et ces échanges sont vite devenus essentiels pour lui. Elles ont fait partie de son éducation, dit-il. Elles lui ont permis de s’ouvrir sur le monde et sur la vie spirituelle. Ces lettres ont été un soutien indéniable pour rester vivant et ne pas succomber à la folie du couloir de la mort. Le nombre de ses correspondants a progressivement augmenté. Mais ce n’est plus le fait de recevoir des lettres qui le sauve, c’est le contenu de ses propres écrits – de nombreux extraits ont été sélectionnés dans un ouvrage intitulé Messages de vie du couloir de la mort dont les recettes ont permis de payer un avocat, le sauvant de l’exécution.
Suite à son transfert à la Wynne Unit de Huntsville, sa vie empire. Paradoxalement, l’isolement le préservait. Il sombre dans la dépression face à la misère humaine qu’il côtoie. Pour s’en sortir, il ressent le besoin vital de venir en aide aux autres détenus. Il développe une correspondance sauf que cette fois, les lettres ne seront plus les siennes mais celles qu’il fait écrire aux prisonniers, leur faisant vivre ce qu’il a lui-même traversé trente ans auparavant.
Les correspondances constituent donc un élément fondamental des actions qui sont mises en place au sein de la prison.
Ces liens avec le monde extérieur sont la preuve que des personnes, quelque part dans le monde, se soucient sincèrement d’eux, les oubliés de la société et de leur propre famille bien souvent. Comme en témoigne Roger dans une de ses lettres : « Il est presque impossible d’expliquer ce que ma correspondance avec toi et mes autres amis a signifié au cours des années. Elle a rempli ma vie au-delà de toute mesure ! Là où je me sentais seul, j’ai maintenant une merveilleuse famille de personnes que j’aime de tout mon cœur ! J’ai une raison de me lever le matin, avec un chant sur les lèvres, une prière dans le cœur et la compassion et l’amour à tout instant dans l’esprit. »
« Ces correspondances ont une influence transformatrice très importante, nous précise Ronald Radford. Elles imposent à ceux qui s’y engagent de mesurer l’importance de ces échanges, grâce auxquels des hommes, dont l’existence est méprisée, retrouvent l’estime d’eux-mêmes. S’ils ne reçoivent pas régulièrement des nouvelles, ils s’inquiètent, pensent qu’on ne tient pas vraiment à eux ou qu’ils ont fait ou écrit quelque chose de mal. Ils sont très isolés, confinés dans un petit espace, alors cette porte pour entrer en contact avec quelqu’un dans le monde libre est essentielle. De son côté, Roger s’assure que le détenu choisi sera honnête et sincère. »
Les correspondants de France, de Suisse ou de Belgique apprennent à confier à un ami les moments importants qu’ils ont vécus et les détenus partagent leurs expériences. Il leur arrive de conseiller leurs correspondants français qui les interrogent sur leurs propres difficultés. Voici un enjeu majeur pour le détenu : ma vie d’homme ne peut pas se résumer à mes erreurs, je peux moi aussi aider. Leurs écrits révèlent des trésors d’une sagesse simple issue de leurs expériences personnelles.
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Pour lire l’article en entier REFLETS n° 36 pages 52 à 54