Cette double langue en Vérité de questions et de réponses, c’est le plus élevé des partages, et c’est celui qui cautionne et permet le partage du dessous. » Le partage du haut (celui des douleurs et questionnements) autant que celui du bas (des biens matériels) constitue, pour Bernard Montaud, la condition première pour réussir la vie communautaire.
Quel est le but de la vie communautaire ?
Historiquement, il y a quelques millions d’années, l’homme est passé d’une vie errante à une vie en tribus soumises encore beaucoup aux lois du monde animal. Puis, il y a environ dix mille ans, et de façon révolutionnaire, est apparu le début du sentiment amoureux, avec le désir de vivre à deux. La notion de couple est donc relativement récente, et pas encore complètement acquise quand on voit les difficultés à vivre le mariage et le nombre de divorces. Alors on peut s’interroger sur l’avenir de ce grand jeu et, selon moi, ce qui va un jour pousser les hommes à passer d’une vie à deux à une vie communautaire, ce sont deux forces.
La première sera une force de partage. Parce que aujourd’hui, la consommation occidentale est devenue pathologique. L’ego occidental est devenu un ego pathologique quand, pour en avoir plus, il appauvrit les autres et appauvrit la terre. L’image qu’on aura de nous dans le futur sera celle d’Occidentaux monstrueux qui accentuaient la misère autour d’eux. On est donc bien devant l’évidence que pour pouvoir conserver un certain confort de vie il nous faudra apprendre à partager. Individuellement, nous ne pourrons plus avoir une grande maison, une voiture, une tondeuse, tous les objets qu’on n’utilise qu’une fois de temps en temps et qu’on pourrait donc bien avoir à plusieurs. Avec la crise, et pour ne pas trop perdre, il nous faudra posséder et partager à plusieurs ce que nous ne pourrons plus nous offrir seuls. La vie communautaire offrira ce partage matériel, ce que j’appelle « le partage du bas ».
Cette expérience est déjà très ancienne dans le monde religieux. En quoi la vie communautaire laïque est-elle différente ?
Il y a dans le principe de vie communautaire – et ça, les monastères l’ont très bien compris – une multiplication intense de la vie spirituelle. Car nous savons bien que c’est le début de la vie spirituelle que de supporter ses propres imperfections et vivre avec celles des autres. C’est la deuxième force que devra exiger la communauté : un regain d’envie spirituelle.
Parce que, s’il est déjà difficile de vivre avec la misère du conjoint quand on est en couple, cette obligation de vivre avec la misère d’autrui se multiplie par cinq si on est cinq à vivre dans la communauté. Quand les hommes comprendront que nous sommes dans une carence pratiquement totale de vie spirituelle et de sens du sacré, il faudra bien revenir à la vie communautaire pour intensifier de manière naturelle nos vies spirituelles.
Selon moi, les deux grands critères qui vont dans l’Histoire exiger l’apparition de la vie communautaire, c’est la nécessité de partage avec correction de notre ego pathologique et le besoin d’intensifier la vie spirituelle.
Y a-t-il des conditions pour s’engager dans une vie communautaire ? Comment s’y préparer ?
Lire la totalité de l’article…Reflets n° 16 pages 24 à 26