Il me vient une image
pour me représenter la solidarité : les humains qui se tiennent fermement par la main, si fort qu’aucun ne puisse lâcher.
L’image est banale. Cependant elle rappelle le sens premier de ce que contient ce mot : solidité.
Selon son étymologie latine, solidus : entier, massif.
Ce qui correspond bien à la définition première : dépendance mutuelle entre les hommes, qui fait que les uns ne peuvent être heureux et se développer que si les autres le peuvent aussi.
L’image donne le sentiment que la pérennité de l’espèce est en jeu selon la solidité du lien.
N’est-ce pas ainsi depuis les temps anciens ?
Certainement dans les tribus préhistoriques la solidarité était une nécessité pour survivre, à l’instar du monde animal. La harde, l’essaim, le troupeau, le banc pour les poissons sont la première expression qu’ensemble on est plus fort. La communauté d’instincts, chacun au service du groupe, crée les conditions de sécurité, de nourriture, d’élevage des petits donc de perpétuation de la vie.
Cette solidarité instinctive est encore bien présente en cas de catastrophe. Dans les grands drames, le meilleur de l’homme se réveille.
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Aujourd’hui,
la prédominance de l’ego – « je me débrouille par moi-même, envers et contre tous » – a altéré la perception de la solidarité. Elle ne doit pas me démunir, ni aller contre mes intérêts personnels.
Ainsi elle se réduit souvent à répondre aux appels aux dons, à donner des affaires usagées que l’on a décidé de remplacer.
Un cran de plus et la solidarité s’exprime affectivement.
Oh comme le pauvre est à plaindre ! Ou l’immigré qui a dû fuir, ou le blessé dans un accident, ou le malade immobilisé dans son lit de douleur.
Sans m’en rendre compte, je crois souffrir pour eux, mais en réalité, je souffre de l’écho produit dans ma propre histoire. Déjà cet autre qui attire ma compassion sort un peu de l’abstraction manifestée par un chèque envoyé à une association. Il prend corps même s’il est loin. Je vais essayer de répondre à son problème sans trop m’impliquer. Sans doute par peur de réveiller ma souffrance du passé.
Un cran plus loin, je m’implique pour aider cet autre
à retrouver une raison de vivre. Par un vrai échange, pour savoir ce dont il a vraiment besoin. Je pense à ces trois femmes réfugiées d’Ukraine qui n’ont d’autre perspective que leur maisonnette et l’assistance de la Croix-Rouge. Parler, proposer, se bouger pour leur trouver du travail, les emmener visiter les environs, découvrir notre culture.
Enfin, admiration pour ceux qui ont la capacité de se mettre au service des autres,
d’en faire leur raison de vivre, leur tâche sur terre. Ce n’est plus le « moi » qui est à la manœuvre, c’est un tout autre comportement où l’autre est aussi important, voire plus important que moi. Cet autre n’a pas seulement besoin d’aide matérielle, de soutien affectif, il a besoin d’être aimé, pour lui-même, comme il est. Cette solidarité – qui n’exclut ni la matière ni l’affectif – est précieuse car elle donne goût à la vie, en valorisant cette personne. Elle sert la vie.
L’image me revient
pour me dire que je ne suis pas grand-chose si je ne suis pas un lien solide avec l’autre.